Odile Vansteenwinckel
Après m’être formée un an dans une école de théâtre à Caracas (me retrouve au même moment que l'élection de Chavez), puis à L'INSAS (Bruxelles), et m’être engagée auprès de compagnies sud américaines, je travaille à la création scénique et à son écriture depuis Bruxelles. A la fois en tant qu’auteur (“bien loin en dessous de la mer, Pièce chorale et poétique ; “gel” ; “spasme”) ; metteur en scène de trois créations (“bureau de tabac” une alternative scénique à l'univers poétique de Fernando Pessoa, “gel”, “qu’est-ce que l’argent ?”) et assistante dramaturge pour un spectacle de danse contemporaine (aux Brigittines, sous la direction de Patrick Bonté). *Gel (Théâtre Marni, Gare maritime de Tour et Taxis, 2009) traite l'euthanasie, de façon fantasmagorique, depuis le couloir dans lequel s'engage un malade qui choisit la mort pour issue.
*Spasme (2011) part de l'observation du "cas Kim de Gelder" (le jeune belge qui en 2009, tue des bébés dans une crèche) et lie ça avec le parcours dans la violence d'un jeune schizophrène. J'entame un nouveau texte autour du « *cas Jessica Billy », une jeune femme belge ayant commis un infanticide, et qui fut acquittée pour déni de grossesse.
En tant qu'auteur j'ai participé à un certain nombre de lectures de mes textes ou ai été mise en lecture en Belgique et en France. Je rejoins la prochaine saison du Théâtre la Balsamine à Bruxelles avec la création *« qu’est-ce que l’argent ? » largement inspirée du débat de 84’ en Allemagne, entre Joseph Beuys et des puissants économistes sur la question. (En collaboration avec François Beukelaers).
Je pars créer à Kinshasa un spectacle qui met en doute le concept même d'utopie (un « dérivé » de Thomas More, premier écrivain de l'utopie). (En collaboration avec Laetitia Ajanohun). Écrire et réfléchir une démarche artistique : (il s'agit bien ici d'une façon d'écrire ma démarche)
Août 2011, je suis de retour d'une préparation de spectacle à Kinshasa, qui tournerait autour d'un questionnement en trois axes : le concept d'utopie tel que défini par Thomas More au 16e siècle, une lecture « de base » de certains textes de la démocratie chez les philosophes ou tragédiens grecs, ainsi que le renversement de l'utopie Europe (le rêve hypothétique d'une communauté européenne). Cette création sera dans un premier temps produite à Kinshasa (décembre 2011), pour revenir à Bruxelles et tenter de retracer le parcours de nos spectres coloniaux. (Projet en collaboration avec Laetitia Ajanohun). Aujourd'hui je reviens sur mes impulsions : pourquoi de façon instinctive, ai-je appréhendé que le théâtre, dans sa contemporanéité, devait se révéler politique ? Je ne peux me départir dans mon travail d'une réflexion politique en continu et qui se poursuit malgré tout (malgré la Belgique elle-même ?).
Alors, qu'est-ce qui serait du théâtre contemporain, du théâtre politique ? Si cela est réel et contemporain, cela est forcément politique. Après on peut avoir un rapport politique au théâtre plus ou moins personnel. Enfin, peut-on s'approprier complètement cette idée du théâtre politique ? Penser que, tandis que je travaille à la définition du contemporain, à Kinshasa rien ne m'a amenée à questionner la contemporanéité, tout l'est intrinsèquement dans cette énergie libertaire et post- apocalyptique. Est-ce l'urgence ou la révolte les commanditaires ? Pour moi la représentation contemporaine serait d'abord la recherche de nouvelles intersections (d'où l'idée de se situer à un confluent, regarder ou faire face à deux endroits au moment où ils se séparent) : Tout commencerait à partir du moment où l'on ne s'évertue plus (seulement) à monter des textes de théâtre. Selon une dramaturgie du texte dit « de répertoire ». Un fonctionnement plutôt classique selon moi.
Mais qu'est-ce qu'un texte de théâtre ? C'est la base de ma réflexion d'auteur. Comment trouver des formes plus libres, (si les beatniks sont sortis de la littérature, en cassant la façon d'écrire un roman, pourrait-on un peu sortir du théâtre ?) plus ouvertes, plus perméables et surtout, plus en phase avec les soubresauts d'une époque en combat avec sa conscience ? Il faudrait frapper les consciences mais en les absorbant. C'est pourquoi mes textes cherchent à se construire sur deux plans d'écriture : un plan issu directement du réel (en introduisant des éléments réels, des faits concrets de notre actualité) et un plan plus métaphysique, se traduisant dans un rapport fantasmagorique entre le « personnage » et cette même réalité. Il y aurait là une première friction. Puis, renforcer le fond, la réflexion, le propos jusqu'au bout, ne pas refuser que le texte de théâtre secoue et donne du relief à des questions profondément métaphysiques. Multiplier les points de vue c'est en multiplier ses lectures. Créer une langue indubitablement (pas comme celle que l'on parle au cinéma ou à la télévision, se défaire absolument de la langue de tous les jours), cela est la spécificité du théâtre. Troubler. D'abord. Pénétrer dans les différentes strates d'une conscience de spectateur..
Pour moi, et c'est peut-être là mon rapport politique au théâtre, l'Europe profondément gangrenée, ne vit plus que de ses pathologies sociales, familiales, culturelles. Assoit sa société sur le tabou de la mort. De l'argent, de la maladie, de la déchéance ou décrépitude. Une psychose de la fin. Une Europe usée, enlisée, sans force (suffisante) de renouvellement. Comment dès lors ne pas tout mettre en doute ? (Il faudrait pouvoir crever tout l'européo centrisme de l'Europe). Il s'agit donc surtout de rentrer dans les tabous.
Enfin, dans cette perspective, qu'est-ce que l'on considère comme une maladie ici en occident et comme une maladie mentale, morale ? Quelles sont les limites entre maladie physique, mentale et violence morale d'une société où la normalité est de plus en plus l'anormalité ? A présent, de retour et en besoins insatiables de mouvements, je veux écrire pour des spectacles chorégraphiques, autrement dit physiques, des mots pour des danseurs. S'associer avec toutes sortes de gens, chorégraphes, philosophes, écrivains, économistes, plasticiens... Travailler sur la répression, le sacrifice. Prochainement je repars créer avec une poignée d'artistes, enfants terribles de Kinshasa, essentiellement des chanteurs, musiciens, plasticiens et écrivains.
*Spasme (2011) part de l'observation du "cas Kim de Gelder" (le jeune belge qui en 2009, tue des bébés dans une crèche) et lie ça avec le parcours dans la violence d'un jeune schizophrène. J'entame un nouveau texte autour du « *cas Jessica Billy », une jeune femme belge ayant commis un infanticide, et qui fut acquittée pour déni de grossesse.
En tant qu'auteur j'ai participé à un certain nombre de lectures de mes textes ou ai été mise en lecture en Belgique et en France. Je rejoins la prochaine saison du Théâtre la Balsamine à Bruxelles avec la création *« qu’est-ce que l’argent ? » largement inspirée du débat de 84’ en Allemagne, entre Joseph Beuys et des puissants économistes sur la question. (En collaboration avec François Beukelaers).
Je pars créer à Kinshasa un spectacle qui met en doute le concept même d'utopie (un « dérivé » de Thomas More, premier écrivain de l'utopie). (En collaboration avec Laetitia Ajanohun). Écrire et réfléchir une démarche artistique : (il s'agit bien ici d'une façon d'écrire ma démarche)
Août 2011, je suis de retour d'une préparation de spectacle à Kinshasa, qui tournerait autour d'un questionnement en trois axes : le concept d'utopie tel que défini par Thomas More au 16e siècle, une lecture « de base » de certains textes de la démocratie chez les philosophes ou tragédiens grecs, ainsi que le renversement de l'utopie Europe (le rêve hypothétique d'une communauté européenne). Cette création sera dans un premier temps produite à Kinshasa (décembre 2011), pour revenir à Bruxelles et tenter de retracer le parcours de nos spectres coloniaux. (Projet en collaboration avec Laetitia Ajanohun). Aujourd'hui je reviens sur mes impulsions : pourquoi de façon instinctive, ai-je appréhendé que le théâtre, dans sa contemporanéité, devait se révéler politique ? Je ne peux me départir dans mon travail d'une réflexion politique en continu et qui se poursuit malgré tout (malgré la Belgique elle-même ?).
Alors, qu'est-ce qui serait du théâtre contemporain, du théâtre politique ? Si cela est réel et contemporain, cela est forcément politique. Après on peut avoir un rapport politique au théâtre plus ou moins personnel. Enfin, peut-on s'approprier complètement cette idée du théâtre politique ? Penser que, tandis que je travaille à la définition du contemporain, à Kinshasa rien ne m'a amenée à questionner la contemporanéité, tout l'est intrinsèquement dans cette énergie libertaire et post- apocalyptique. Est-ce l'urgence ou la révolte les commanditaires ? Pour moi la représentation contemporaine serait d'abord la recherche de nouvelles intersections (d'où l'idée de se situer à un confluent, regarder ou faire face à deux endroits au moment où ils se séparent) : Tout commencerait à partir du moment où l'on ne s'évertue plus (seulement) à monter des textes de théâtre. Selon une dramaturgie du texte dit « de répertoire ». Un fonctionnement plutôt classique selon moi.
Mais qu'est-ce qu'un texte de théâtre ? C'est la base de ma réflexion d'auteur. Comment trouver des formes plus libres, (si les beatniks sont sortis de la littérature, en cassant la façon d'écrire un roman, pourrait-on un peu sortir du théâtre ?) plus ouvertes, plus perméables et surtout, plus en phase avec les soubresauts d'une époque en combat avec sa conscience ? Il faudrait frapper les consciences mais en les absorbant. C'est pourquoi mes textes cherchent à se construire sur deux plans d'écriture : un plan issu directement du réel (en introduisant des éléments réels, des faits concrets de notre actualité) et un plan plus métaphysique, se traduisant dans un rapport fantasmagorique entre le « personnage » et cette même réalité. Il y aurait là une première friction. Puis, renforcer le fond, la réflexion, le propos jusqu'au bout, ne pas refuser que le texte de théâtre secoue et donne du relief à des questions profondément métaphysiques. Multiplier les points de vue c'est en multiplier ses lectures. Créer une langue indubitablement (pas comme celle que l'on parle au cinéma ou à la télévision, se défaire absolument de la langue de tous les jours), cela est la spécificité du théâtre. Troubler. D'abord. Pénétrer dans les différentes strates d'une conscience de spectateur..
Pour moi, et c'est peut-être là mon rapport politique au théâtre, l'Europe profondément gangrenée, ne vit plus que de ses pathologies sociales, familiales, culturelles. Assoit sa société sur le tabou de la mort. De l'argent, de la maladie, de la déchéance ou décrépitude. Une psychose de la fin. Une Europe usée, enlisée, sans force (suffisante) de renouvellement. Comment dès lors ne pas tout mettre en doute ? (Il faudrait pouvoir crever tout l'européo centrisme de l'Europe). Il s'agit donc surtout de rentrer dans les tabous.
Enfin, dans cette perspective, qu'est-ce que l'on considère comme une maladie ici en occident et comme une maladie mentale, morale ? Quelles sont les limites entre maladie physique, mentale et violence morale d'une société où la normalité est de plus en plus l'anormalité ? A présent, de retour et en besoins insatiables de mouvements, je veux écrire pour des spectacles chorégraphiques, autrement dit physiques, des mots pour des danseurs. S'associer avec toutes sortes de gens, chorégraphes, philosophes, écrivains, économistes, plasticiens... Travailler sur la répression, le sacrifice. Prochainement je repars créer avec une poignée d'artistes, enfants terribles de Kinshasa, essentiellement des chanteurs, musiciens, plasticiens et écrivains.