Éditorial

Involution 02 - L’Art-Réalité

L'art est d'abord un moment du réel, il fait partie du réel. Comme un regard en biais sur « les choses de la vie ».
Et quelle est notre réalité ? La crise ! La crise, rengaine lancinante qui semble sans espoir, et c’est sans doute pour cette raison qu’elle est salutaire. En soi, le « moins en moins » nous pousse à poser des actes de plus en plus réfléchis.
En ces temps d’austérité, la Balsa ne renonce à rien de ce qui lui est essentiel et persévère à transmettre ses valeurs fondamentales.
Cette transmission, ce partage sont proposés à travers nos positionnements artistiques, une forme de sobriété heureuse à l’image de ce programme. Toutes les photos ont été commanditées par la Balsamine dans un souci de plaisir des yeux mais, également, parce que ce sont des documents de leur temps, des images qui coïncident avec la vie. Celles-ci ne montrent que des aspects du quotidien avec des héros pudiques en jeux de mains et de regards. La tension naît ici du contraste entre une tranquillité feinte et une secrète activité.
Ici, encore, il faut saluer la qualité de travail de Hichem Dahes oeuvrant sur un glissement particulier de son art photographique : rendre la réalité à son temps, redonner de la perspective au réel, permettre de voir le réel dans une totale expressivité. Dès lors le matériel n’est pas détourné, il est utilisé pour devenir matériau et l’image se fixe sur ses propres limites. Il faut réinvestir l’art parce qu’aujourd’hui, il faut faire vite, faire simple et que cela soit bon et beau.
Maintenant que cet objet est entre vos mains, sachez qu’il vous convoque à :

- 6 créations comme des chroniques de l’infra-ordinaire, une anthropologie de ce qui se passe chaque jour, le banal, l'évident, le commun, le bruit de fond habituel. Une photo et ses détails, un paysage sonore, une géographie de l’immensément grand à l’immensément petit, où le divin cohabite avec l’humain, un voyage où les termes du protocole sont transparents. Un exotisme à portée de main.

- 5 « bootstraps », soit 9 soirs de rendez-vous performatifs, sortes de chaos où les artistes puisent leur énergie pour faire émerger, de façon cosmique, un univers qui leur est propre.

- Plusieurs immersions dans le processus créatif - « lundis Bla-Bla Balsa » et « Aftershow » – révélant ce que l’on donne à voir, ce que l’on peut montrer. En prime et, cerise sur le gâteau, un projet pédagogique inédit qui renforce cette dynamique de la nécessité. Nous vous invitons d’ailleurs à nous contacter pour en prendre connaissance et pour en jouir.
Votre participation à la vie du théâtre peut prendre librement diverses formes : logorrhée, silence, ou encore, un état de présence comme un principe d’identité, d’acte démocratique.
La Balsamine se vit comme un espace collectif, public et artistique, une source d’énergie à l’état pur, comme les vagues sur la mer et l’eau dessous, avec un effet spontanément antigravitationnel et revigorant. Une maison accessible à tous et dont la politique tarifaire n’est pas là pour le démentir.

Pour vivre ce « Théâtre contemporain, mode d’emploi », ce jour et nuit de la vie artistique, ce quotidien de la pratique, il suffit de consulter notre site qui rend compte de ce quotidien telle une porte ouverte permanente sur la vie intime et familiale du lieu.
Finalement, que nous manque-t-il aujourd’hui, de quoi avons-nous réellement besoin, qu’est-ce qu’un théâtre en ordre de marche, sommes-nous en quête de rassasiement ou en quête de goût? Le débat reste ouvert !
Certes, chaque édito veut donner l’illusion de tout acter, d’être au plus proche de la plus pure vérité. Or, ce que l’on vous écrit ici, on pourra vous le redire encore dès notre rencontre, car il ne s’agit pas seulement de défendre des spectacles ou d’en faire la promotion mais surtout de savoir au nom de quoi on le fait. Et vous le comprendrez aisément car il en va ainsi de tous les choix que notre société fera dans l’avenir.
Plus vous tâterez de la chair de la Balsa, plus vous la ferez exister. Et de son décor enténébré, vous ferez jaillir la clarté.
Monica Gomes et Fabien Dehasseler